La futurologie est une étude interdisciplinaire et empirique des tendances ou données (technologiques, économiques, historiques, sociales…) en vue d’esquisser des scénarios plausibles de l’avenir. Des organisations influentes comme la CIA, le ministère américain de la défense ou des multinationales collaborent avec des futurologues.[1] Lorsqu’il est réalisé par des organisations puissantes aux intérêts particuliers, il est légitime de penser qu’en décrivant des événements futurs potentiels, l’exercice de futurologie peut servir à les anticiper, à les atténuer ou à les aggraver, à les manipuler ou à les susciter pour en tirer profit, au gré d’intérêts spécifiques, des plus nobles aux plus vils.
Dans un rapport de mai 2010, la Fondation Rockefeller, en collaboration avec le Global Business Network du futurologue Peter Schwartz, membre du conseil du 21e siècle de l’influent et discret institut Berggruen[2], a publié un scénario sur l’avènement d’un « monde de contrôle gouvernemental strict » et d’un « leadership plus autoritaire » à travers une crise sanitaire.[3]
A la page 19 dudit rapport rédigé en 2010, il est écrit : « En 2012, la pandémie que le monde anticipait depuis des années a finalement frappé. Contrairement au H1N1 de 2009, cette nouvelle souche grippale (…) était extrêmement virulente et mortelle. Même les pays les plus préparés à la pandémie ont été rapidement submergés lorsque le virus s’est propagé dans le monde entier, infectant près de 20% de la population mondiale et tuant 8 millions de personnes en seulement sept mois…». Le rapport poursuit : « La pandémie a également eu un effet désastreux sur les économies : la circulation internationale des personnes et des marchandises s’est interrompue, fragilisant des industries comme le tourisme et brisant les chaînes d’approvisionnement mondiales. Même localement, les magasins et bureaux habituellement animés sont restés vides pendant des mois, sans employés ni clients ».
Le scénario envisagé dans ce rapport de 2010 devient encore plus intéressant sur les conséquences politiques de la gestion de la crise sanitaire encore d’actualité : « Pendant la pandémie, les dirigeants nationaux du monde entier ont fléchi leur autorité et imposé des règles et des restrictions strictes, du port obligatoire de masques au contrôle de la température corporelle à l’entrée des espaces publics comme les gares et les supermarchés. Même après la disparition de la pandémie, ce contrôle et cette surveillance plus autoritaires des citoyens et de leurs activités ont été maintenus, voire intensifiés. Afin de se protéger de la propagation de problèmes mondiaux croissants – des pandémies et du terrorisme international aux crises environnementales et à la montée de la pauvreté – les dirigeants du monde entier ont renforcé leur emprise sur le pouvoir ». Le scénario de la Fondation Rockefeller semble se dérouler aujourd’hui avec des libertés constitutionnelles devenues la variable d’ajustement d’une crise sanitaire permanente.
[1] BoingBoing, October 31, 2007, https://boingboing.net/2007/10/31/game-theory-and-futu.html, https://discourse.world/h/2007/11/01/The-CIA-uses-game-theory-to-predict-the-future ; University of Houston, July 13, 2020, https://www.houstonforesight.org/25-of-fortune-500-practices-foresight/
[2] Berggruen Institute, https://web.archive.org/web/20170106173236/http://governance.berggruen.org/councils/21st-century-council/members
[3] https://www.nommeraadio.ee/meedia/pdf/RRS/Rockefeller%20Foundation.pdf
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